L’homosexualité est un sujet tabou dans la plupart des pays du Moyen-Orient bien qu’elle soit devenue courante dans ces sociétés. Le Liban, lui, ne reconnaît pas officiellement ce phénomène, mais se distingue par une plus grande tolérance envers l’homosexualité dans la région.
En Arabie saoudite les homosexuels sont flagellés, en Égypte ils sont emprisonnés et en Iran ils sont souvent condamnés à mort. Mais au Liban, la communauté gay bénéficie de la première association pour les homosexuels au Moyen-Orient, ainsi que des bars et des discothèques qui leur sont exclusivement réservés.
Le quotidien de cette frange de la population n’est pas simple pour autant. La société libanaise, considérée comme la plus moderne de la région, reste conservatrice, particulièrement dans les villages de la montagne et dans les familles plutôt pieuses.
Plus d’indulgence
«Ces personnes sont anormales! Si mes enfants étaient comme elles, je les aurais déshérités», s’indigne Abou Issam, propriétaire d’un magasin de vêtements à Sin el Fil. «Il y a une loi contre eux, les policiers devraient l’appliquer. Nous ne voulons pas devenir comme les pays européens», poursuit le vieux commerçant.
«Au Liban, les homosexuels sont souvent montrés du doigt parce qu’ils sont différents», explique Tatiana, jeune universitaire. «Je ne suis pas contre eux, ce n’est pas parce qu’ils ont une appartenance différente de la nôtre que nous devons les rejeter», ajoute l’étudiante.
Les avis sont partagés parmi les Libanais, mais ce sont les anciennes générations qui ont le regard le plus extrême sur les homosexuels. Les jeunes, eux, semblent indifférents et plutôt habitués à l’idée.
«Notre niveau de vie a évolué depuis quelques années et il est certainement meilleur que dans d’autres pays arabes», raconte Abdo, qui ne cache pas son homosexualité à ses amis. «La réaction des gens dépend de leur éducation, mais je n’ai jamais eu de problèmes à cause de ma sexualité», poursuit le jeune homme. «Notre situation aujourd’hui est bonne, nous n’avons pas besoin de la changer. Le gouvernement est indulgent en ce qui concerne nos activités, ce n’est plus comme avant», affirme Léa, 25 ans, ouvertement lesbienne. «Je trouve que nous sommes moins critiquées que d’autres le sont pour leur appartenance sexuelle», ajoute-t-elle.
Loi archaïque
Helem est la première association pour les droits de cette communauté au Liban. Fondée en 2004, elle travaille pour éliminer la discrimination envers les homosexuels, les lesbiennes, les bisexuels et les transsexuels.
«Nous travaillons depuis 7 ans pour abolir l’article 534 du code pénal libanais, qui déclare explicitement que la «pénétration sexuelle contre nature» est punie par la loi, et non pas l’homosexualité en soi ou le fait d’adopter une identité gay», explique Ghassan Mkari, directeur exécutif de Helem. «C’est une loi qui dérive de l’ancien système juridique français et il est nécessaire de la changer pour assurer les droits de cette communauté», poursuit M. Mkari.
«La violence contre les homosexuels provient essentiellement des membres de leur famille. C’est une question d’honneur et de traditions dans notre société qui préserve toujours le concept de virilité chez l’homme et la féminité chez les femmes», reprend M. Mkari. «Nous travaillons avec le ministère de la Santé pour assurer les besoins de notre communauté et sensibiliser ses adhérents sur les maladies sexuellement transmissibles», ajoute le directeur exécutif
de Helem.
La situation des homosexuels s’est certainement améliorée au Liban, même si la société ne l’a pas ouvertement reconnue. L’appartenance sexuelle ne doit pas déterminer l’attitude envers un individu, tant qu’elle ne viole pas la liberté de l’autre. Principe qui s’est curieusement bien appliqué au Liban, bien qu’il soit un pays arabe et plutôt conservateur.
Les noms de certaines personnes citées dans ce reportage ont été changés pour préserver leur anonymat.